Rencontre avec Roland et Rafi Durand
Reportage : Thierry Rippol (Toreria.net pour vuelta)
Tout à commencé à Tarascon au tout début du XXeme siècle quand Joseph Durand devient le propriétaire des arènes et y organise des spectacles taurins, des corridas hispano-camarguaises, des caballeros en plaza…. Lui qui en plus d’être un organisateur taurin (Vichy, Sète, St Rémy) en 1898 commencera sa manade à base de bêtes issues de toute la planète taurine régionale et d’Espagne, achetant même aux arènes de Nîmes, les six toros d’une corrida qui aurait dut être lidiée à Namur en Belgique !!!! C’était la grande époque des croisés. Un élevage qu’il laissera à son fils Jo en 1937 et qui existera jusqu’aux débuts des années soixante….
Fils et petit-fils d’éleveurs, Roland Durand débutera à cheval en 1963 à l’âge de 13 ans dans des arènes portatives à Privas. C’était le début d’une carrière de caballero en plaza, la plupart en simulacre, et qui durera jusqu’en 1978 coïncidant avec l’arrivée des rejoneadors J. Bonnier, G. Pellen, L. Jalabert qui feront grandement évoluer la corrida à cheval en France….
En 1981, il décide, peu après avoir débuté dans le transport des toros en succédant à Hubert Yonnet qui fut le 1er à le faire en France, de créer sa propre ganaderia avec à l’origine des bêtes provenant de François André, Hubert Yonnet et Gilbert Mroz, qu’il remplacera en 1996 par un troupeau du Marquis de Domecq qu’il devra faire abattre en 2000 pour cause de tuberculose. C’est avec des bêtes de Dominguez Camacho que le propriétaire du Mas du vieux Capeau à Mas Thibert repartira.
Entre temps, Raphael né le 1er novembre 1982 et il est de tout jeune passionné par le toreo à cheval. Parrainé par Marie Sara puis par Luc Jalabert il fera sa présentation en public à l’âge de 17 ans aux Saintes Maries de La Mer, l’aube d’une brillante carrière qui prendra fin peu après son alternative, alternative reçue le 20 mai 2002 dans les arènes de Nîmes
Le sang murubeño des Dominguez Camacho n’offrant guère de débouchés, c’est par un changement radical avec des bêtes de Miranda de Pericalvo que s’est orientée finalement la ganaderia.
Rencontre avec Roland et Rafi Durand….
-Avant d’évoquer les graves problèmes actuels, j’aimerais faire un petit tour sur votre élevage en 2020….
–Nous avons une cinquantaine de mères, toutes d’origine Miranda de Pericalvo. Cette année on a mis deux étalons nouveaux, un Miranda et un José Vasquez de chez Marie Sara plus une quarantaine d’añojos, 20 males et vingt femelles de la ganaderia Sainte Cécile de Michel Mejias…
-De quels pays aujourd’hui disposent le troupeau ?
-Il se partage 180 hectares dont une cinquantaine en location, deux pays sur Mas Thibert, le mas du Vieux Capeau ou il y a toutes nos installations, corrales, placita de tienta, une partie de Cote Neuve. Et dans les marais de Rapheles le mas des Tourbieres….
Combien de mâles devaient être combattus cette saison ?
–On a une une belle camada avec une quarantaine de becerros et une quinzaine de novillos…. On avait pas mal de demandes mais tout est resté à ce stade. Un toro devrait sortir à Istres, c’est le novillo qui était prévu pour Arles en avril et les deux becerros des Saintes Maries de La Mer pour Lalo de Maria..
-Aujourd’hui tout est à l’arrêt. Coté taurin, pratiquement plus d’arènes jusqu’à nouvel ordre, très peu de fiestas, de faenas camperas et de tentaderos que les clubs taurins organisaient….
–Aujourd’hui on ne sait toujours pas où on va avec ce maudit virus, cette année on va quasiment pas vendre les toros, c’est très inquiétant, car tous les jours il faut leur apporter du grain et du foin pour les nourrir (sans parler du reste des charges !), des frais qui en plus augmentent….Quasiment rien non plus d’organisé…. J’ai peur aussi que les gens réalisent qu’ils peuvent se passer de corridas, de feria et qu’ils ne reviennent pas tous….Il y a le Covid mais pas que ça. Il y a très peu, trop peu de jeunes et il serait essentiel qu’ils viennent en grand nombre au campo, aux arènes pour assurer la transmission…. J’ai bien peur que l’avenir de la corrida soit derrière nous…
-Comme tous vos collègues, vous êtes face à des abattoirs qui n’ont plus guère de débouchés pour la viande, ce qui augmente encore vos problèmes avec cette crise qui semble ne jamais en finir… Et qui permettrait d’éliminer les bêtes qui auraient dues l’être dans l’arène…
–C’est vrai qu’eux aussi sont dans l’impasse. Les restos, les cantines, les casitas et bodegas dans les ferias, tout ça reste pratiquement fermé. Mais heureusement qu’Alazard et Roux sont encore là. Ils y en a qui les critiquent. Tout n’est pas parfait je l’admets. Mais s’ils n’étaient pas là, nos problèmes avec la viande seraient plus importants encore.…
Le Mas du Vieux Capeau est une plaque tournante dans le monde français des toros. Avec ses installations fonctionnelles et à l’extrémité de la chaîne du transport des lots de toros, de très nombreuses corridas et novilladas sont passées par là en attendant dans les corrales de partir définitivement pour les arènes…
–Cette année le premier transport fut pour les arènes de Beaucaire, fin juillet, là on va faire les Saintes et après… quasiment plus rien…. La boucle est bouclée
Depuis le déconfinement, le bout du tunnel semble poindre à l’horizon, surtout du coté des faenas camperas…. Un jour prochain les arènes devront toutes se rouvrir et la vie reprendre ses droits…. A condition que….
Un retour à la normale pour tous ceux qui ont sacrifié leur vie pour leur passion, le toro de combat…. En espérant qu’ils soient encore là tous sur la ligne de départ, même si on sait que de grosses réductions du nombre de bêtes sont en cours et que quelques fers sont sur le point de disparaître…..