Reportage Campo : ganaderia “La Suerte”, le bonheur de Joe Gabourdes

Installée sur les rives du Rhony à Saint Dionisy

La Suerte-ganadero

Reportage : Thierry Ripoll (toreria.net pour vuelta)

Il y a six ans, en 2017 que cet incontournable aficionado de Nîmes, s’est lancé dans l’aventure ganadera. Issu d’une vieille famille d’aficionados nîmois, J. Gabourdes hante toutes les instances taurines gardoises et au delà. Des Amis de Pablo Romero à la Coordination des clubs taurins de Nîmes et du Gard en passant par le Printemps des jeunes aficionados … Et aujourd’hui éleveur de toros bravos

 » Je ne vous dis pas ce que j’ai entendu des copains de Pablo Romero. Moi qui est toujours défendu le toro de combat et les ganaderias qui font de la résistance, j’élève du  Domecq …J’aurais pu, grâce à Tomas Campuzano, passer avec du Guardiola. Mais cela aurait été un projet sur 20 a 25 ans pour réhabiliter cet encaste et la faire accepter par tous. A l’âge que j’ai, je mise sur une bonne dizaine d’année et avec les choix que j’ai fait, ça fonctionne déjà pas mal« 

Installé sur les rives du Rhony à Saint Dionisy au cœur de la Vaunage, la ganaderia est à 10 kms à vol d’oiseaux des arènes de Nîmes. La bonne centaine de bêtes se partage les 25 ha du campo avec quelques parcelles en plus pour le fourrage… Pourquoi vouloir élever des toros ?

 » Je dirais que j’ai fait ça irrationnellement, presque naturellement sans trop me rendre compte de ce que je faisais. Manu Turquay est un éleveur et un copain, qui avait acheté une vingtaine de bêtes d’origines Sampedro aux frères Gallon, ses voisins à Mas Thibert, pour des fiestas camperas, des tientas… sa vision de ganadero étant depuis toujours le Santa Coloma avec du Pablo Mayoral pour origines. On se trouve ensemble à Séville en Feria avec cette ivresse légère et festive qui libère les paroles, celles de Manu plus proche des lamentations que l’exubérance sur les coûts, le travail et l’entretien d’un troupeau devenu un peu trop important. Et là comprenant son désarroi insistant, je lui dit devant tout le monde : Manu, arrête. J’achète tes Gallon. « 

 L’éleveur d’Eyguières n’osa pas rappeler J. Gabourdes pour savoir si c’était vrai ou si ça avait été une parole en l’air… Il a par contre appelé tous mes proches amis qui lui ont affirmé que si j’avais dit ça, c’était sa parole, une parole fiable…

« Passée ma propre surprise, je me suis dit pourquoi pas mais j’avais acheté une vingtaine de bêtes, je n’avais pas un mètre carré de terrain et il me restait encore quelques mois avant ma retraite. J’ai demandé alors à Manu de me les garder au moins un an pour que je puisse m’installer. »

C’est ainsi qu’il a acquit parcelle après parcelle, transformé des vignes en prairies, clôturé des hectares de cercados, créé des buttes pour faire face aux éventuelles inondations du Rhony, monté des installations pour le maniement et les soins du troupeau à la devise rouge basque et beige.

« Avec mon ami Yvon Verdier on s’est mis au travail et je lui doit énormément, la maladie le tient aujourd’hui éloigné de la ganaderia mais rien ne se serait fait sans lui. Et j’ai d’autres copains aussi sur qui je peux compter, comme sur le jeune torero Clément Hargous« 

Par l’intermédiaire de Manuel Campuzano, il a put faire rentrer trois erales de la ganaderia de Montes de Oca d’origines Marques de Domecq dont un est l’un des sementales de “La Suerte”, qui a rejoint le troupeau des Gallon. Un second lot est arrivé en provenance de chez Angel Luis Peña, d’encaste Jandilla…

« Heureusement que José Luis Algora, le veterinaire, ex repreneur des Partido de Resina était avec moi. Car des gens qui viennent pour acheter des lots de bêtes avec souvent les poches pleines de billets, ça les intéresse. Mais un petit français qui veut une quinzaine de vaches et un mâle, c’est moins courant et moins intéressant. Mais A.L. Peña a été très compréhensif. Et finalement j’ai été très bien servit. »

Une bonne quinzaine de mères ajandillada avec un semental de El Torero d’un coté et l’équilibre quasi parfait avec les juanpedras de Gallon avec un Montes de Oca de l’autre… Soit une vingtaine de naissance par an..

« Ça me va très bien, les clubs taurins me permettent de faire combattre mes erales et depuis que je suis rentré à l’Association des Éleveurs Français de Toros de Combat, j’ai pu sortir au coup par coup, un becerro dans les arenes comme à Ales ou Fourques. Cinq cette année et j’ai même fait mes débuts dans le Sud-Ouest, à Castelnau, Riscle. Mais je réserve toujours quelques mâles que je fais lidier à 3 ans, avec picador, dans des fiestas camperas car si tu te contentes que des sans chevaux, tu ne peux pas voir l’évolution de ton élevage »

Pour les tentaderos, il se fait héberger chez des confrères, des proches comme Michel Barcelo, Mathias Forestier, Vincent Fare et ce sont essentiellement des toreros nîmois qui en ont la charge, Rafi, Solal, Nino…

« Mes novillos ne sortent pas mal mais surtout ma grande hantise, comme pour la plupart des ganaderos, c’aurait été de voir mes bêtes, ne pas tenir debout, s’affaler sur le sable d’une arène… Et ça c’est ma principale satisfaction. La Suerte, ça tient debout. Pour le reste, c’est le travail de sélection qui me fera progresser et arriver un jour à sortir une becerrada complète… »

Même si pouvoir sortir un jour un lot dans ses arènes, celles de Nîmes, reste un rêve très lointain, inaccessible, inimaginable, La Suerte c’est le bonheur de Joe Gabourdes…

La Suerte-ganadero

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